mercredi 20 mars 2013

Un devoir au Téléjournal : retour sur une polémique


par Simon Delattre
Courriel: esd1062@umoncton.ca

Suite au débat lancé par Marc-André Villard, professeur de biologie, sur le niveau du français des étudiants; Marie-Noëlle Ryan, professeur de philosophie, a été reçue sur le plateau du Téléjournal Acadie le mardi 5 février dernier. Elle y a soutenu qu’une partie des étudiants souffrent de lacunes dans l’expression de la langue, et a présenté une copie d’étudiant anonyme et pleine de fautes pour appuyer son propos.

C’est ce geste qui a fait réagir la FÉÉCUM. La Fédération étudiante a déposé un recours officiel auprès du Sénat Académique, l’instance qui réglemente les affaires de l’Université relatives à l’enseignement et à la recherche. Dans une lettre adressée au recteur, plusieurs mots forts sont employés : « Il y a eu dérogation aux Statuts de l’U de M, en ce qu’un travail réalisé par un(e) étudiant(e) s’est retrouvé non seulement diffusé dans la communauté à l’insu de la personne concernée, mais pis encore exposé dans les médias à des fins diffamatoires. 

Aucune preuve n’a été fournie par Radio-Canada du “consentement écrit de la personne concernée” en ce qui concerne le document en question. »

Marie-Noëlle Ryan s’est défendue devant le Sénat Académique du jeudi 7 mars. Dans son message, elle se dit « profondément outrée de la lettre de la FÉÉCUM », « sans mentionner mon nom, elle me vise directement et comporte des accusations autant graves qu’inacceptables ». Elle déplore la manière dont se passe le débat : « Cette entreprise de calomnie et d’intimidation à mon égard vient prouver à nouveau que la tactique de s’attaquer aux personnes s’exprimant publiquement sur le problème récurrent et très grave de la qualité du français dans notre institution permet d’éviter de s’attaquer à la question de fond ».

 La professeure nous explique sa démarche : « Si je me suis exprimée publiquement, c’est parce que le problème me tient à cœur. J’ai voulu donner une preuve et illustrer un constat, qui est que 10 à 15 % des copies sont illisibles. J’ai lancé ce cri d’alarme, car le niveau de la langue se dégrade et ça nuit à tout le monde. Il en va de l’avenir des étudiants et de la réputation de l’Université. Nous les professeurs, on parle sur la place publique, car il n’y a pas de débat à l’interne. » Selon elle, les accusations portées dans la lettre sont fausses et diffamatoires.

Maurice Rainville, professeur d’éthique à la retraite, a apporté son soutien à Madame Ryan : « L’anonymat a été respecté puisque tout élément permettant d’identifier l’auteur du devoir a été retiré. On ne peut pas non plus l’accuser de diffamation puisque pour qu’il y ait diffamation il faut qu’une personne soit identifiée comme victime. Il s’agit d’un procès d’intention, car son but était de faire comprendre le problème et de faire avancer les choses. On ne peut pas faire de la recherche sans données, ni cas à étudier. »

 Pour Nicolas Steinbach, journaliste à Radio-Canada, les principes éthiques ont été respectés : « la vue du document était d’ensemble et le nom n’a pas été donné. Si on avait pu identifier la personne, il aurait bien sûr fallu demander l’accord de l’étudiant. » 

Sur son blogue, la FÉÉCUM a tenu à réajuster le tir : « que l’on accuse la FÉÉCUM d’intimidation et de diffamation, alors que les interventions de la Fédération ont été conduites à l’interne, hors de l’espace public, tient de la mauvaise foi et frise la désinformation. C’est en vérité la réputation des étudiants de l’Université de Moncton qui a quelque peu été traînée dans la boue. À partir d’un exemple isolé, le Téléjournal a prétendu donner une vue d’ensemble sur la qualité de la langue écrite des étudiant(e)s de notre institution ».

 Michel Albert agent des communications de la FÉÉCUM a voulu clarifier la position de la Fédération : « Une confusion a été faite, on ne cherchait pas à blâmer ou à punir, mais plutôt à poser la question des droits des étudiants. Est-ce que quand je donne un devoir il m’appartient encore, est-ce qu’il peut passer aux nouvelles? Nous avons été choqués que cela puisse se passer et ça nous a fait réagir. » Joëlle Martin, Présidente de la FÉÉCUM assure quant à elle que « l’intention n’a jamais été d’empêcher quiconque de s’exprimer ».

La Fédération étudiante a obtenu du Sénat Académique le 7 mars, la constitution d’un comité « chargé d’étudier les règlements universitaires, et la place qu’y occupent les droits des étudiant(e)s ». À sa demande, Marie-Noëlle Ryan a rencontré les membres de la FÉÉCUM le vendredi 15 mars, afin de « clarifier les choses ».

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