mercredi 30 janvier 2013

L’épopée des fœtus de cochon : du ventre de l’animal à la dissection en cours de bio

par Simon Delattre

Le récit d’une élève écœurée de la dissection de fœtus de cochon lors de son cours de biologie a piqué la curiosité de votre enquêteur du Front. D’où viennent-ils? Comment parviennent-ils jusque devant le regard dégouté ou amusé des étudiants?

Première étape, direction le pavillon Rémi-Rossignol! Je monte les escaliers quatre à quatre, pousse une porte, puis une autre et atterris dans le local de préparation des laboratoires. J’y rencontre Erick Batailler, du département de biologie, l’occasion de lui faire part de mes interrogations. « On les achète à des entreprises américaines, ils nous livrent des seaux pleins, mais on ne sait pas comment ils s’y prennent pour les obtenir. », me dit-il. J’aperçois justement derrière une vitre les seaux blancs en question. Toujours intrigué, je questionne ensuite Julie Anne Richard, technicienne en biologie, qui m’en apprend davantage : « je commande les fœtus de cochon de la compagnie Ward's mais je ne sais pas qui est leur fournisseur et comment ils font pour avoir les spécimens. Il faudrait les contacter pour qu'ils vous donnent plus d'informations. » Bonne idée!

Trois clics et me voilà connecté sur le site de Ward’s. Je consulte alors le catalogue comme quelqu’un s’apprêtant à faire ses commissions… et tombe sur des articles qui sortent de l’ordinaire! On me propose d’acheter un fœtus de cochon pour environ 20 dollars selon la taille du spécimen. Mais attention : je peux aussi bénéficier d’une remise de 10 pièces pour l’achat de 10 fœtus! Les collectionneurs fortunés pourront même obtenir 50 fœtus pour la modique somme de 383.95 $… Il y a même la possibilité de choisir un supplément « veines et artères injectées de latex bleu et rouge ».

J’envoie alors un courriel à Brenda Hardy, chargée des relations avec les clients canadiens pour Ward’s. Elle me répond très vite : « Les fœtus de cochon proviennent de l’industrie de conditionnement de la viande où ils sont considérés comme des déchets. Nous récupérons leurs “déchets” et les recyclons en outil pédagogique, autrement ils finiraient dans une décharge ou un incinérateur ». Je lui demande donc avec quelle industrie en particulier ils ont cet accord, mais elle me dit ne pas disposer de cette information, avant d’ajouter « je vous assure que tout est réglo. »

Entre temps j’ai pu parcourir plus en détail le catalogue, découvrant des articles encore plus surprenants. Sont disponibles : des fœtus de cheval, de chèvre, le squelette d’un fœtus de chat, et même une chatte enceinte déjà disséquée! J’interroge donc Brenda : est-ce que l’industrie de conditionnement de la viande leur fournit aussi ce genre d’animaux? Jusqu’à présent je n’ai pas eu de réponse.

Par contre, j’ai appris que l’achat de ces articles est tout de même soumis à des restrictions, c’est-à-dire que seuls des chercheurs ou des professeurs peuvent en faire l’acquisition. Plusieurs sites à l’image de www.stopvivisection.info critiquent cette méthode d’enseignement. Ils mettent de l’avant des alternatives à la dissection, par exemple des vidéos, des livres, des modèles ou des logiciels de dissection virtuelle. Ces outils pédagogiques sont présentés comme étant moins cruels et plus économiques : 60 dollars pour un CD-ROM qui n’implique pas d’agent de conservation, pas de matériel de dissection, ni de spécimen à commander chaque fois.

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