jeudi 17 janvier 2013

Réforme de l’assurance-emploi

par Simon Delattre

La mesure affectera davantage les plus démunis et les régions rurales de la province

Les nouveaux règlements modifiant la loi sur l'assurance-emploi sont entrés en vigueur dimanche le 6 janvier. Nombreux sont ceux qui craignent que la décision fédérale ait des conséquences néfastes pour certaines populations du Nouveau-Brunswick. Les chômeurs seront contraints d'accepter des postes à 70 % de leur salaire et pourraient devoir faire jusqu'à une heure de route pour aller travailler, sans quoi ils seront privés de leur revenu d’assurance-emploi. Le nouveau système établit des mesures très strictes pour les chômeurs qui ont reçu des prestations à trois reprises. Ces derniers auront désormais six semaines pour se trouver du travail dans leur domaine.

Un coup dur pour les zones rurales
Denis Losier, président-directeur général de la compagnie d’assurance Assomption-Vie, estime que « cela peut créer des situations extrêmement difficiles pour les régions rurales où les emplois ne sont pas tellement disponibles. Dans le nord de la province, il n’y a pas plus d’emplois à 75 kilomètres à la ronde. Lorsqu’on force un salarié à accepter un revenu à 75% de ce qu’il était, c’est pousser un peu. Les emplois vont continuer à se concentrer dans les milieux urbains et au Nouveau-Brunswick, qui est la deuxième province la plus rurale, cela représente un défi énorme. Forcer les gens de ces régions-là qui sont des mineurs, des pêcheurs, des travailleurs forestiers à prendre un emploi à Saint-Jean ou à Fredericton et dans des secteurs qu’ils ne connaissent pas pose problème. »

La mesure pourrait donc accélérer la désertion des campagnes déjà touchées par l’exode rural. Michel Deslierres, du département d’économie de l’Université de Moncton, explique que « sans prestation d’assurance-emploi, les travailleurs saisonniers quitteraient en grande proportion ces régions et l’industrie de la transformation du poisson ou l’industrie touristique par exemple auraient de la difficulté à trouver de la main d’œuvre. »

Une réforme utile et juste ?
Le gouvernement du Canada espère réaliser des économies de 12,5 millions de dollars en 2013 et 33 millions pour les années suivantes. Il investira 7,2 millions de dollars dans des mesures de contrôle pour s'assurer que les prestataires sont bel et bien à la recherche d'un emploi. Pour d’autres, l’effet sur le taux de chômage et les dépenses n’est pas clairement établi. Selon Ronald Leblanc, professeur d’économie à l’Université de Moncton, « il pourrait bien avoir une augmentation des dépenses provinciales d'aide au revenu pour les personnes ayant perdu l'assurance emploi. ». Michel Deslierres, est d’avis que « vu le nombre relativement restreint d’individus visés par ces changements, l’impact sur le taux de chômage réel sera minime. ». Il rappelle que « tout effort demandé pour régler un problème collectif doit être réparti entre tous de façon équitable. ».

Or la loi s’attaque principalement aux plus démunis. « C'est toujours les moins favorisés qui subissent les conséquences les plus sévères des réduction des dépenses. Est-ce juste? » questionne Ronald Leblanc. Il parle d’« une politique d'appauvrissement » des chômeurs contraints d’accepter un emploi moins bien payé et qui implique des frais de transport plus importants. On ne peut en tout cas pas reprocher au gouvernement conservateur de Stephen Harper de ne pas être en accord avec ses principes. Il s’agit là de la simple application d’une idéologie basée sur la réduction du rôle de l’État et une confiance absolue envers l’économie de marché.

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